jeudi 7 mai 2009

Fashion addicts à la Cour

crédit photo: A Bailhache






Après le homard de Jeff Koons, le Château de Versailles se tourne vers une exposition beaucoup moins polémique : "Fastes de cour et cérémonies royales, le costume royal d'autrefois."





Faille de soie, mousselines, crêpes et brocards cousus de fils d'or et incrustés de diamants. C'est la splendeur des vêtements de Cour qui s'étale devant nous. Peu de vêtements français, car il était d'usage pour les souverains de donner leurs costumes respectivement au premier gentilhomme de la chambre pour le roi et à la dame d'atours pour la reine. Beaucoup furent ensuite dispersés chez les fripiers parisiens. La Révolution a liquidé ce qui restait.




Pourtant, c'était bien la cour de Versailles qui impulsait la mode. Le vêtement sous-tendait un véritable langage politique très codé et son rôle était de traduire visuellement l'extrême hiérarchie du pouvoir absolu.

Cette expo me fait penser à mon cher XVIIIème siècle. Celui de Fragonard, des verrous tirés, des petites maisons en bordure de ville, et des dîners galants...





Fragonard, Jean Honoré : Le verrou,1778






Crédit photo : A. Bailhache

Nous sommes au début du XVIIIème siècle. Le style rococo fait fureur en France. Il succède à l'austérité de la fin du règne de Louis XIV. C'est une bouffée de sensualité d'érotisme et de libertinage. On se libère du carcan de la religion et de la morale que Madame de Maintenon, la dernière femme de Louis XIV, avait fait peser sur le royaume.

Je vous propose une petite promenade dans les arcanes de la beauté, la légèreté et des loisirs teintés de libertinage .


Pour inaugurer ce parcours : un court extrait du Barry Lyndon de Stanley Kubrick et cette fastueuse scène filmée uniquement à la lueur des chandelles sans autre ajout de lumière. Fascinant !




Vous avez remarqué le teint blanc des personnages ? Une belle restitution de ce que devait être le maquillage à cette époque.

"Le rôle d'une jolie femme est beaucoup plus grave qu'on ne le pense ; il n'y a rien de plus sérieux que ce qui se passe le matin à sa toilette. Un général d'armée n'emploie pas plus d'attention à placer sa droite ou son corps de réserve qu'elle en met à poster une mouche qui peut manquer mais dont elle espère ou prévoit le succès."

Montesquieu, Lettres Persannes : lettre CX, 1721

Boucher, François : La toilette.
C'est aussi l'époque des chinoiseries en décoration. Regardez le paravent.

Nous y sommes donc, l'art de la toilette relève de stratégies les plus fines et renvoie à l'art de la guerre.

Le jeu de la séduction est en effet, une impitoyable bataille. Il convient de satisfaire aux diktats des apparences : un jeu cruel.
La carnation blanche signale une personne bien née. En promenade au jardin, le visage sera donc protégé par un chapeau à larges bords, une ombrelle , un "robinson". On évitera les lieux trop ombragés cependant au risque d'attraper "un refroidissement de poitrine". L'aristocratique carnation sera protégée d'onguents épais comme la céruse (du carbonate de plomb !). Il serait, en effet impensable de paraître sans avoir le visage couvert d'un fond de teint blème et opaque. Sur l'épiderme ainsi dissimulé, on aura soin de dessiner de fines veines bleues. Puis, avec un crépon d'Espagne dont la laine est imprégnée de pigments carmin, on soulignera les ombres et reflets voulus. Pommettes, lèvres... Enfin, selon l'humeur ou la stratégie du jeu amoureux en cours, on posera une ou plusieurs mouches. Si, initialement, cette petite lune noire de taffetas servait à masquer "une élevure" elle devint vite une coquetterie destinée à mettre en valeur la pâleur du teint. Il ne restera plus qu'à poser un langage galant sur la place qu'occupe la mouche. La "passionnée" s'immisce au coin de l'oeil, la "galante", au milieu de la joue, la "scrupuleuse" plus bas vers le menton , l' "effrontée" s'invite sur le nez, tandis que la "baiseuse" est posée tout près des lèvres. La "receleuse" est une nécessité et se place là où un bouton a eu la mauvaise idée de pousser.


Fragonard, Jean Honoré : la balançoire 1766/67...
Vous avez vu l'adorable petite mûle qui s'envole ?





Fragonard, Jean Honoré : Jeune fille jouant avec son chien vers 1770/73





Boucher, François : Hercule et Omphale.





Etreintes, baisers, nudité, caresses. Il n'est pas rare que l'artiste se retranche derrière la mythologie pour proposer des scènes érotiques.









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2 commentaires:

Anonyme a dit…

Merci pour vos encouragement sur mon blog.
Le votre m'intéresse aussi, j'y reviendrai régulièrement.
Au passage, j'avais vu un épisode de la série "Palettes" sur Arte, qui décriptait le tableau de Fragonard ("le verrou"). Je me souviens qu'il s'agissait d'une scène de viol, avec une évocation du sexe de la femme (les rideaux rouges à gauche).

Thierry (avec5sens)

alluria a dit…

@Thierry
J'ai craqué l'an dernier et je me suis offert l'intégrale des "Palettes" en DVD. Une délectation ! Et bien, moi aussi, je fréquenterai votre blog. Merci à vous
Alluria